Les années de formation. L'exil et le royaume Imprimer
  • 1949

L'écrivain naît à Châteaurenard en Provence. L'occitan est une langue parlée et entendue dans le milieu familial, dans le village. Ainsi Roland Pécout l'évoque-t-il dans un entretien avec Françoise Jouanna daté de juin 1979 (revue Talvèra, 6, Paris, mai 1980, traductions MJ Verny) :

La langue qui me venait de l'enfance comme quelque chose de sauvage, affectif, charnel et éclaté.

La lenga (que) me veniá de l'enfança coma quauquaren de sauvatge, afectiu, carnau e espetat...

Si de cette ascendance rhodanienne l'écrivain a gardé la langue, la fascination pour Mistral, le maître de Maillane, il sera tout le contraire d'un enraciné. Le métier de ses parents le conduit à partir de l'âge de dix ans dans d'autres lieux que le lieu de naissance, l'Ain notamment. Voici ce qu'il dit de cette période de sa vie :

L’exil ? J’ai passé la seconde période de mon enfance en dehors de l’Occitanie, en France, et c’est là que je me suis senti différent. Douleur et amitié de l’exil du dehors et du dedans ! Elle nous pousse comme le vent.
 

L'exilh ? Ai passat lo segond periòde de mon enfança fòra Occitània, en França, e es aquí que me sentiguère diferent. Dolor e amistat de l'exilh dau defòra e dau dedins ! Nos buta coma lo vent (entretien avec Françoise Jouanna, Talvèra, 6, Paris, mai 1980).

Par ailleurs, celui qui lui donna le goût de la langue occitane fut - est-ce un paradoxe ? - c'est en tout cas une clé pour comprendre les thèmes qui parcourent l'œuvre - un grand-père voyageur et notamment connaisseur du Brésil. L'essai La Musique folk des peuples de France (1978) est dédié à ce grand-père Francés Brando, qui savait tant de choses de la culture du peuple.

Le premier contact de Roland Pécout avec la littérature occitane se fit à l'âge de 15 ans. Il avait spontanément demandé Mirèio de Mistral pour Noël à son père :

J'avais 15 ans et personne ne m'avait encore parlé de l'Occitanie. J'ai été bouleversé et cela a été pour moi comme une révélation de retrouver, malgré les difficultés de lecture, des mots, des expressions que je croyais propres à mon village ou à ma famille… Son existence propre vue dans le miroir de l'Autre, du Dehors, le sentiment de soi devient conscience de soi. Cela fonctionne un peu comme un premier amour. Aviái 15 ans e degun m'aviá encara parlat d'Occitània. Foguère espantat e me foguèt coma una revelacion de retrovar, maugrat lei dificultats de legida, de mots e de biais de dire que cresiáu ren que de mon vilatge o de ma familha... Sa pròpria existència miralhada per l'Autre, per l'En-Defòra : lo sentiment de se ven consciència de se. Aquò fonciona un pauc coma un primièr amor.

L'expérience que résume ici Pécout est comparable à celle qui a été racontée par bien d'autres écrivains occitans. On pense notamment à Max Rouquette, et à son récit fondateur des courejolos, ces liserons cueillis par son père qui lui récita en même temps une strophe de Mirèio, provoquant ainsi un éblouissement durable.

Parallèlement à cette découverte de la littérature provençale, l'écrivain se passionne pour ses études d'espagnol ; il y reconnaît une langue sœur, et s'intéresse à la littérature et aux civilisations d'Amérique Latine.

  • 1966

Le premier texte de Roland Pécout, adaptation, en graphie mistralienne, d'un poème de Ronsard « Quand vous serez bien vieille... », est édité dans L'Armana prouvençau (Aix, 1966, rubrique « Lou cantoun di Legèire ») pour le concours de traduction organisé par la revue.

  • 1966 - 1967

Roland Pécout, qui avait découvert la graphie classique dans une grammaire d'Alibert achetée à Barcelone lors d'un voyage familial, suit un stage de l'Institut d'Estudis Occitans à Coaraze dans l'arrière-pays niçois. Il fréquente également les militants marseillais du Calen, parmi lesquels le poète Georges Reboul avec lequel il noua une solide amitié et qui lui dédia d’ailleurs un poème et Guy Martin, militant occitaniste provençal, spécialiste de géographie et de linguistique. À la suite de ces différents contacts, Pécout compose son premier recueil poétique en graphie classique : La Sòm de la tèrra. Ce recueil obtint le Prix Jaufré Rudel qui consistait en une édition de l’œuvre. Effet pervers du mouvement de mai : au moment où l'édition aurait dû se réaliser, en 1968, bien d'autres préoccupations étaient là, et l’œuvre se perdit. Il n'en reste que quelques bribes - la première strophe d’un poème - dans la mémoire de l'auteur.

Revanche du sort : en 2000, Roland Pécout obtient de nouveau le Prix Jaufré Rudel pour son ouvrage Mastrabelè.

article précédent

article suivant