Soutenance de thèse

Le Jeudi, 2. décembre 2021 -
9:00 - 13:00
Salle des Actes à l’Université Paul-Valéry Montpellier 3 - Site Saint Charles

Madame Charlène CRUXENT

Soutiendra jeudi 2 décembre 2021 à 9 h

Salle des Actes n°011 à l’Université Paul-Valéry Montpellier 3, Site Saint-Charles

une thèse de DOCTORAT

Discipline : Études du monde anglophone

Titre de la thèse : (Sur)nommer dans le monde de Shakespeare

Composition du jury :

  • M. Yan BRAILOWSKY, Maître de conférences habilité, Université Paris Nanterre
  • M. Richard COATES, Professeur émérite, Université de l’ouest de l’Angleterre (Royaume-Uni)
  • Mme Alison FINDLAY, Professeure, Université du Lancaster (Royaume-Uni)
  • M. Jean-Christophe MAYER, Directeur de recherche CNRS, Université Paul-Valéry Montpellier 3, codirecteur de thèse
  • Mme Nathalie VIENNE-GUERRIN, Professeure, Université Paul-Valéry Montpellier 3, directrice de thèse

Résumé de la thèse

Cette thèse a pour but d’analyser l’utilisation et le rôle des surnoms dans les poèmes narratifs, les pièces de théâtre et les sonnets de William Shakespeare. Les origines du terme « nickname » (surnom) – une altération de l’expression « an ekename », littéralement, un nom d’addition – permettent d’adopter une définition du terme qui inclut une large gamme de stratégies de dénominations informelles (appellations et titres dénigrants ou élogieux, diminutifs, pseudonymes et surnoms affectueux). La notion d’addition est au cœur des surnoms : ce sont des noms officieux ajoutés aux noms propres et/ou qui viennent remplacer ces derniers, ce qui semble indiquer qu’ils ont une fonction dramatique spécifique qui va au-delà de la simple fonction dénotative. Cela nous a également incité à prendre en compte certains noms propres qui véhiculent un sens que les « désignateurs rigides » (« rigid designators », Saul Kripke) ne transmettent pas. Appelés à juste titre « quasi-nicknames » par Allen Kellogg, ces occurrences permettent d’apporter un éclairage sur la nomenclature shakespearienne dans la mesure où ils remplissent la fonction de référent tout en incorporant des éléments descriptifs qui participent à la création de l’univers poétique du dramaturge.

Néanmoins, le rôle des noms n’est pas purement ornemental : un surnom peut mettre en exergue les caractéristiques d’un personnage (traits de caractère ou physique, statut social), et révéler la relation que les interlocuteurs entretiennent. Bien que les surnoms soient généralement conférés à un personnage, plusieurs protagonistes sont représentés comme choisissant eux-mêmes de se renommer ; c’est la raison pour laquelle il convient d’adopter une approche linguistique et pragmatique pour explorer les différents usages et effets des noms dans les œuvres de Shakespeare. Certains surnoms déstabilisent les structures (hiérarchiques) habituellement instaurées par le biais de noms propres et de titres qui, sur scène, véhiculent l’identité des personnages. La polysémie du verbe « to nickname » dans l’Angleterre élisabéthaine (donner un surnom, utiliser une appellation erronée, blasphémer et vilipender) permet de mettre à jour l’aspect ambivalent des surnoms : tantôt affectueux, tantôt injurieux (et parfois les deux en même temps), les noms officieux ont un lien étroit avec l’identité de ceux qui les portent et peuvent ainsi entacher ou perpétuer la renommée d’un individu. En exposant le processus de création des surnoms et leurs conséquences, Shakespeare exploite le potentiel ludique et dramatique des noms dont la réception (par les personnages et par les spectateurs/lecteurs) donne à voir les subtilités de cet acte de langage.

Cette thèse démontre que les stratégies de dénomination non officielles offrent une vision approfondie des personnages shakespeariens, et de leur trajectoire dans ses pièces et ses poèmes. La gamme de surnoms utilisés dans les œuvres poétiques est beaucoup moins diversifiée que celle des œuvres dramatiques, ce qui suggère l’importance du rôle des surnoms dans les relations interpersonnelles sur scène. En étudiant l’emploi des noms informels dans les pièces de Shakespeare, il est également possible d’éclairer la façon dont la dénomination a un impact sur le genre du personnage renommé et sur le genre de la pièce dans laquelle la nouvelle appellation apparaît (comédies, pièces historiques et tragédies). Plutôt que d’établir une liste des « quasi-nicknames » et des surnoms présents dans les œuvres du dramaturge, cette étude propose d’examiner chaque élément et de le replacer dans le contexte dramatique, social, linguistique et historique dans lequel il apparaît afin de comprendre les mécanismes qui se dissimulent derrière les noms. Malgré l’apparente banalité des (sur)noms, un dialogue entre les œuvres de Shakespeare et d’autres sources littéraires et historiques des XVIe et XVIIe siècles révèle qu’une culture du surnom existait bel et bien en l’Angleterre à cette époque.

Dernière mise à jour : 19/11/2021