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Page de titre

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Parmi les importantes innovations qui touchent à l'apparence physique de l'imprimé, celles que connaît la page de titre comptent parmi les plus remarquables . Rare dans les manuscrits, elle apparaît dès les premiers incunables qui, d'abord, laissaient vierge le recto du premier feuillet avant que le texte ne vienne remplir cet espace laissé vide. Dans les premiers temps, la page de titre se distingue par sa simplicité et sa quasi-nudité, puisque seul l'occupe un titre bref, souvent sans aucun nom d'auteur. L'unique illustration dont la page de titre soit pourvue se limite généralement à la marque de l'imprimeur-libraire. Mais les éléments qui la composent se multiplient au cours du siècle, tant du point de vue des informations relatives à l'identité du livre que du point de vue de l'ornementation, de plus en plus travaillée.

Hélisenne de Crenne, Les angoysses douloureuses qui procedent d’amours, Paris, Denis Janot, 1538.
Source : BnF/Gallica

La qualité esthétique de la première page grandit la valeur culturelle et marchande du livre. Tandis que le premier tiers du XVIe siècle est l'époque des « grandes marques et des encadrements dissymétriques », les années qui suivent sont celles « de l'équilibre ornemental », où « l'encadrement devient un fronton symétrique dessiné en perspective : on entre dans un livre comme dans une ville par une porte ou un arc à l'italienne » .

L’Arioste, Roland furieux, Lyon, Sulpice Sabon, 1544
Source : BnF/Gallica

Portiques, colonnes torsadées, grotesques et motifs végétaux forment le seuil de ce qu'il convient d'appeler le livre-monument, lieu d'expression privilégié de l'imaginaire architectural que le XVIIe siècle portera à son apogée. La page de titre des Angoysses douloureuses d'Hélisenne de Crenne (1538) ou celle du Roland furieux, publié à Lyon en 1544, fournissent un parfait exemple de la somptuosité des encadrements ornés, où prolifèrent inscriptions, cariatides et figures monstrueuses.

Rabelais, Gargantua, Paris, Denis Janot, 1537.
Source : BnF/Gallica

 

L'ornementation de la première page fait, en outre, des marges le territoire de l'image, comme dans cette édition du Gargantua de Rabelais de 1537. Par sa fonction programmatique, la page de titre appelle en effet naturellement la présence d'une illustration qui vient répéter, compléter ou prolonger l'horizon d'attente qu'ouvre l'énoncé titulaire. Aussi devient-elle une invite à franchir aussi bien le seuil du livre que le seuil du texte. Prenant place en un lieu qui, par sa nature même, incite à s'arrêter pour constituer une première captation vers le texte - le seuil - ces images prennent valeur paratextuelle, acquièrent une fonction liminaire et inaugurale qui se conforme aux effets de sens prévus par cette structure, pré-requis par elle. Elles attirent l'attention du lecteur, que ce soit par leur qualité esthétique, qui retient efficacement le regard et satisfait le plaisir des yeux, ou par leur fonction signalétique : images claires ou cryptées, symboliques ou énigmatiques, elles donnent d'emblée accès à l'intimité d'un texte dont elles peuvent livrer une vision synthétique, fixer l'appartenance générique ou fournir une clé interprétative. Dès lors, l'image est là pour baliser la lecture et, de fait, la contraindre, alors même que celle-ci n'a pas encore commencé.

Exemples de pages de titre sur le site de la BnF


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