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Exemples de pratiques d’enseignement

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La littérature antique fourmille d'exemples sur les pratiques de lecture et de prise de notes dans l'école de ces époques. C'est ainsi que Platon, dans le Protagoras (325d), évoque l'éducation traditionnelle à Athènes, mais aussi sa finalité qui était de produire des citoyens à la fois responsables et vertueux :

« Quand on envoie un élève à l'école, on recommande bien plus au maître la bonne tenue de l'enfant que ses progrès dans la connaissance des lettres ou de la cithare ; le maître, de son côté, y donne tous ses soins, et quand les enfants, sachant les lettres, sont en état de comprendre les paroles écrites, il fait lire à la classe, rangée sur les bancs, les vers des grands poètes, et lui fait apprendre par cœur ces œuvres remplies de bons conseils, et aussi de digressions, d'éloges où sont exaltés les antiques héros, afin que l'enfant, pris par l'émulation, les imite et cherche à se rendre pareil à eux... »

Cité dans À l'école des anciens, p. 88.

Quelques siècles plus tard, à la fin du 1er siècle avant J.-C., le père de Sénèque le Philosophe se plaint d'une certaine décadence de l'art oratoire. Quelque cent cinquante ans plus tard, on retrouvera les mêmes critiques sous le calame de Pétrone, dans le Satiricon :

« Pour dire toute ma pensée, ce qui fait de nos écoliers des maîtres sots, c'est que, de tout ce qu'ils voient et entendent dans les classes, rien ne leur offre l'image de la vie : ce ne sont que pirates avec des chaînes embusqués sur le rivage, tyrans préparant des édits commandant des fils à décapiter leurs propres pères... »

(c. 1).

Cette école « déconnectée » de la vie est liée à des exercices qui ne reflètent aucune situation de la vie réelle.

Aux trois fonctions cardinales du discours selon Cicéron (Orat. 21, 69) - émouvoir (mouere), enseigner (docere) et plaire (delectare) - se substitue alors le seul delectare : en recherchant les enjolivements, les flores, le déclamateur flatte l'imaginaire, non l'intellect. La déclamation, quand elle passe de son usage dans la vie courante à celui de l'école, est parfois caractérisée par l'enfermement du déclamateur sur lui-même et par la confusion entre le public et l'orateur, puisqu'un déclamateur ne s'adresse qu'à de futurs déclamateurs qui lui servent de miroir, même si, comme la recherche récente l'a montré, la pratique déclamatoire garde sa valeur idéologique et culturelle.

L'appauvrissement de l'enseignement ne concerne pas seulement l'art oratoire : c'est désormais l'époque du compendium, isagogè ou résumé en tout genre ! De façon générale, on constate en effet une prédilection progressive pour les compilations, manuels, encyclopédies, comme si le livre se réduisait progressivement à son utilisation professionnelle dans des cercles toujours plus étroits. Ainsi, à son tour, le contenu du livre reflète celui de l'enseignement.

Mais certains cours de philosophie restent d'un haut niveau, comme dans cet exemple du monde grec tardif (Ve siècle) :

« Hiéroclès [...] commentait un jour à son auditoire le Gorgias de Platon : un de ses auditeurs, Théosébius, avait pris note du commentaire. Une autre fois, Hiéroclès, comme cela arrive, reprit le Gorgias après un certain temps, et le même auditeur copia à nouveau le commentaire ; quand il compara ses premières notes aux dernières, il n'y retrouva pour ainsi dire rien de semblable ; cependant, les unes et les autres - fait étonnant - suivaient d'aussi près que possible le sujet traité par Platon. Voilà qui démontre quel esprit vaste était celui d'Hiéroclès »

Cf. À l'école des anciens, p. 83.

L'anecdote illustre bien le commentaire philosophique proposé par un brillant professeur qui, apparemment, improvise.

À cet enseignement oral d'Hiéroclès s'oppose celui, écrit, d'un Galien qui, au IIe siècle, se plaint de la diffusion non contrôlée - et usurpée - du texte de ses cours :

« Pour ce qui est de la raison qui amena de nombreuses personnes à donner lecture de mes ouvrages comme étant les leurs propres, toi-même tu la connais, mon excellent Bassus. Je les donnais en effet à des amis ou à des disciples, sans titre, dans la pensée qu'ils n'étaient aucunement destinés à la publication, mais à ceux-là mêmes qui avaient formulé la demande de conserver des notes sur les cours qu'ils avaient écoutés. Certains étant morts, ceux qui par la suite entrèrent en possession de mes livres, furent séduits par eux et en donnèrent lecture comme étant les leurs propres ; d'autres également, de leur vivant, en vendirent des copies, pour leur honte, afin de tromper les gens, car ils étaient dans le besoin ; d'autres les copièrent, livre après livre, les modifièrent et les exhibèrent pour s'en vanter ; d'autres enfin, les ayant reçus de ceux qui les possédaient, s'en revinrent dans leur patrie et les massacrèrent clandestinement chacun à leur façon pour donner des conférences. Mais avec le temps tous furent pris en flagrant délit de plagiat »

Cf. À l'école des anciens, p. 111.

De telles pratiques liées à l'enseignement, comme la conférence publique, constituent un des cas particuliers du devenir de tout écrit.


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