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Préparation du papier

Icône de l'outil pédagogique Préparation du papier

La fabrication du papier, qui a varié selon le temps et le lieu, a longtemps connu les mêmes étapes.


Le choix du genre de plantes ou de tissu

Pendant longtemps, la matière première était constituée de chiffons. La première étape consistait donc dans le ramassage de chiffons. Mais, avant de devenir du papier, les chiffons devaient subir de nombreux traitements. Et d'abord un bon tri (débarrasser le tissu des corps étrangers de toutes sortes - boutons, objets métalliques..., éliminer coutures et ourlets) qui conditionnait l'homogénéité du papier obtenu, car ce sont précisément les fibres qui devaient donner plus tard la « trame » du futur papier. Après lavage, venait le pourrissage, étape au cours de laquelle le tissu, plongé dans une cuve pendant plusieurs jours, se transformait peu à peu en une pâte appelée la « chiffe » qui, à son tour, subissait un vigoureux traitement mécanique dans des cuves de forme ovoïde appelées « piles ».

 

La forme

La pâte est puisée dans une forme qui laisse son empreinte sur la feuille : « Une forme est composée d'un châssis de bois de chêne », peut-on lire dans l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert, « que l'on a laissé tremper longtemps dans l'eau, après qu'il a été débité et séché à plusieurs reprises, pour lui faire perdre entièrement sa sève et faire qu'il soit moins sujet à se déjeter.

« Les longs côtés du châssis, qui sont percés de vingt trous pour recevoir les extrémités d'autant de barres de sapin qu'on appelle pontuseaux, sont formés à leur partie supérieure en vive arête comme le tranchant d'un couteau. C'est sur le tranchant des pontuseaux que reposent les fils de laiton qui forment le tamis ou grillage de la forme, les vergeures. Toutes les pièces de la forme sont assemblées et cloutées ensemble, soit avec des petites chevilles de bois ou avec des clous d'épingles de laiton. Les vergeures sont fixées sur les pontuseaux par des fils de laiton beaucoup plus fins que ceux des vergeures ».
Encyclopédie de Diderot et d'Alembert


Source : Denis Muzerelle, Vocabulaire codicologique: répertoire méthodique des termes français relatifs au manuscrit.
Paris, 1985 (Rubricae, 1).
Version en ligne sur le site de l'IRHT
On distingue trois types de formes :
  • la forme flottante, la plus rudimentaire, est composée d'un châssis de bois sur lequel est tendue une simple toile de tissu. Elle est plongée dans un bassin empli d'eau et, lorsqu'elle revient flotter à la surface, on y dépose à la main la pâte à papier,
  • la forme rigide, où le châssis et la toile sont fixés l'un à l'autre dès la fabrication,
  • la forme souple comprend deux parties : un châssis de bois rectangulaire renforcé par des traverses (pontuseaux) parallèles aux petits côtés ; un second rectangle, de dimensions à peu près similaires, constitué de fibres végétales (fils vergeurs) disposées dans le sens de la longueur ; ces fibres sont liées les unes aux autres par des fils de chaînette, perpendiculaires aux fils vergeurs et placés à intervalles plus ou moins réguliers, parfois regroupés par deux ou trois. Fils vergeurs et fils de chainette constituent la trame. Deux baguettes de bois, disposées aux extrémités, maintiennent le tout.

Au moment du puisage, l'ensemble - châssis, trame et baguettes - est tenu à deux mains par les petits côtés, et plongé directement dans la cuve contenant la pâte à papier, qui a été préparée à l'avance pour plusieurs feuilles. Une fois la forme sortie de l'eau et l'excédent d'eau écoulé, la feuille, qui ne garde aucune trace de la forme, est détachée de celle-ci et mise à sécher. La forme est alors de nouveau disponible pour fabriquer, sans attendre, une nouvelle feuille.

Au fond de la forme, sur le treillis, était généralement fixé un motif : c'est le filigrane, constitué par une petite figurine logée dans l'épaisseur même du papier.

Un ouvrier, l'« ouvreur », plonge dans la cuve contenant la chiffe en suspension la forme dont la dimension du cadre donne la dimension des feuilles à venir. La forme est ensuite passée à un autre ouvrier, le « coucheur », qui la retourne pour déposer la feuille encore très humide sur un feutre. On obtient ainsi des piles, les « porses », formées de couches de papier et de couches de feutre absorbant alternées et qui sont placées dans une presse qui permet d'expulser toute l'eau qui reste. Après quoi, le papier est détaché des feutres.

 

Le mode de séchage

Les feuilles sont ensuite conduites dans un local spécial, « l'étendoir » pour séchage. Maintenues par des pinces, elles sont suspendues à l'air libre et, suivant la saison, la durée du séchage varie de deux à sept jours et peut être favorisée par des volets qui permettent d'orienter le courant d'air et d'en favoriser les effets.



L'encollage

Un apprêt final est nécessaire, car la surface de la feuille est encore trop rugueuse : le papier est alors soumis à un nouveau traitement, « l'encollage ». La colle unit en effet les fibres et donne à la feuille plus de solidité en même temps qu'une surface plus lisse. Le polissage ou lissage enfin, à l'aide de la pierre ponce, fait disparaître les dernières rugosités ou aspérités de la surface de la feuille.

Vergeures et pontuseaux sont attachés par des fils de laiton plus fins appelés « chaînettes » : les fils de chaînette, en empêchant les pontuseaux de se déplacer, régularisent l'écart entre les fils métalliques. Souvent ce treillage comporte un fil de laiton fixé à la trame, qui représente soit une ou plusieurs lettres, soit un dessin (écu, couronne, grappe de raisin...) : c'est le filigrane, dont l'empreinte inscrite dans la pâte s'aperçoit par transparence dans la texture du papier. Il s'agit de la marque du fabricant, qui peut indiquer le nom du moulin, celui du papetier, ses initiales, la région ou la date de production... Le plus ancien filigrane connu apparaît sur un papier italien fabriqué en 1282 à Bologne par un papetier venu de Fabriano.

Lors de l'égouttage de la pâte à papier à travers le tamis, les pontuseaux laissent une marque dans l'épaisseur du papier, appelée elle-même pontuseau. Cette marque est visible par transparence (comme un filigrane) dans le papier dit vergé. Les mêmes marques dans le sens horizontal, laissées par le tamis, sont les vergeures, terme qui désigne d'abord les fils de laiton attachés en long sur la forme.


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