Psittacula Krameri, une beauté envahissante ?

Psittacula Krameri, une beauté envahissante ?

"La perruche à collier : De la belle exotique à la belle invasive"

A. Berthier, P. Clergeau, R. Raymond, 2017
Annales de géographie

Nom scientifique : Psittacula krameri (Scopoli, 1769)

Nom vernaculaire : la perruche à collier

Ordre : Psittaciformes

Famille : Psittacidae

Caractéristiques morphologiques : La perruche à collier est une grande perruche, d’une longueur et d’une envergure d’environ 40 cm à la queue longue et pointue. Elle possède un bec crochu, large et arrondi, de couleur rouge plus ou moins foncée. Oiseau avec un faible dimorphisme sexuel : le mâle adulte possède un fin collier noir et rose que les femelles ne possèdent pas. Le plumage est le plus souvent vert clair même si des formes roses, jaunes ou bleu clair existent.

Son cri est puissant est très caractéristique.

Comportement : Oiseau sédentaire et grégaire (qui vit en groupe) : les perruches se rassemblent pour se nourrir, pendant les périodes de reproduction mais également à la tombée du jour car elles passent la nuit sur un arbre dortoir. Leur rythme de vie journalier est, comme la plupart des oiseaux, bimodal. Cela signifie que les perruches ont deux pics d’activité (le matin et en fin de journée) pendant lesquels elles sortent chercher de la nourriture, et une phase de repos importante entre ces deux pics (en milieu de journée).

Cycle de vie : Sous nos latitude, la reproduction de la perruche à collier à lieu dès la fin de l’hiver (en mars-avril). Le dortoir, lieux où les individus se regroupent pour passer la nuit, est en général abandonné au profit des sites de reproduction jusqu'à l'automne. La femelle pond ses œufs dans des cavités naturelles (trous d’arbres…) existantes. Les perruches sont des cavernicoles secondaires, leur bec ne leur permet pas de creuser des cavités mais seulement d’agrandir des cavités existantes.

Régime alimentaire : Granivore-frugivore opportuniste, elle utilise une grande variété de sources d’alimentation : bourgeons ou fruits (pommiers, ifs, cerisiers, érables) qu’elle attaque souvent en groupe mais profite également du nourrissage par l’homme (fruits, boules de graisse…). Dans sa zone de répartition d’origine, elle est considérée comme un ravageur des cultures.

Elles nichent essentiellement en haut de grands arbres à cavités naturelles (platane, érable…) mais peuvent également faire leur nid dans des fissures de rochers ou de bâtiments.

Habitat et répartition : Leur aire de répartition naturelle est très vaste et va de l’Afrique subsaharienne à l’Inde.

La perruche à collier est une espèce très prisée comme oiseau de cage et elle a été exportée dans le monde entier. Il est de plus en plus fréquent de trouver des populations sauvages dans les villes : autour de Paris, on en dénombre plusieurs milliers et plus de 20 000 dans le grand Londres. A Montpellier, elle serait présente depuis plus de 25 ans.

Ces populations sauvages sont souvent issus d’individus lâchés volontaires ou des échappés qui se reproduisent ensuite. C’est une des rares espèces d’oiseaux dont les effectifs sont en très fortes augmentation en ville.

Une espèce invasive est une espèce qui, une fois introduite sur un nouveau territoire, devient nuisible à la biodiversité locale car elle perturbe l’écosystème dans lequel elle s’établit. Ces espèces sont considérées comme l’une des principales causes de l’érosion de la biodiversité mondiale, ce sont donc des menaces qui doivent être surveillées afin de limiter leur impact. Elles peuvent être introduites volontairement à des fins récréatives, alimentaires ou ornementales, mais également de manière involontaire, comme ce fut certainement le cas pour la perruche à collier.

En tant qu’espèce invasive, la perruche à collier déclenche plusieurs craintes :

Problèmes écologiques

  • En Europe, elle n’a pas de véritable prédateur et peut vivre trente ans, ce qui représente une longue durée de vie en comparaison d’autres espèces locales. De plus, elle vit en groupe, elle peut donc parasiter la biodiversité francilienne
  • Elle s’adapte très vite à de nouveaux environnements (y compris les parcs urbains) car elle résiste au froid et elle peut donc s’installer de façon permanente
  • Elle est une nuisance pour la biodiversité locale car elle occupe l’habitat d’espèces cavicoles et le modifie, le rendant inutilisable. Elle est donc en compétition avec les oiseaux locaux car elle s’installe dans leurs nids et les déloge : pics vert, étourneaux, passereaux cavernicoles (mésanges, moineaux…) mais également chauve-souris !
  • Elle est également en compétition alimentaire avec d’autres granivores : gros-becs, pinsons, écureuils...

Problème économique

  • Elle provoque des impacts économiques sur les cultures car elle dévore les bourgeons, abîme les arbres fruitiers et les cultures céréalières. Si elles venaient à sortir des villes, elles représenteraient un problème majeur car elles s’attaqueraient aux cultures agricoles.

C’est donc une espèce fortement invasive mais qui est très appréciée du public pour la beauté de son plumage coloré et parce qu’elle symbolise l’exotisme. Cette attractivité aux yeux de tous la protège, ce qui complique la lutte contre son invasion.

Pour limiter leur prolifération, il convient au moins d’éviter les lâchers volontaires et les nourrissages excessifs dans les parcs.

Représentation artistique

Sur ce tableau de Jan Van Eyck, peint en 1434, vous pouvez apercevoir dans les mains du Christ un oiseau familier au pelage vert : la perruche à collier. À l’époque médiévale, la perruche symbolise la virginité de la Vierge et la toute-puissance de Dieu. On lui reconnaissait le don de pouvoir dire “Ave”, ce qui est une référence à l’Annonciation, la première parole de l’archange Gabriel devant le miracle de la naissance du Christ. Ainsi, “Si un perroquet peut dire Ave par nature, pourquoi une vierge pure ne peut-elle enfanter par l’Ave de l’ange Gabriel ?” (Naftulin). C’est pour cette raison que l’association est faite entre la perruche et la Vierge Marie, principalement sur des représentations de Vierge à l’Enfant.

Au-delà du symbolisme, la présence de la perruche sur ce tableau trahit l’existence, en Europe, d’un commerce d’animaux exotiques très ancien. Mais c’est seulement depuis 1970 que la population de perruches à collier a explosé, modifiant le paysage urbain européen, avec des conséquences que vous venez de découvrir.

Master Valorisation et Médiation des Patrimoines Promo 29, Magaly Cauterman et Mélissandre Colom

Une perruche à collier dévorant un fruit d'If

Copyright Alan Vergnes

Dernière mise à jour : 24/10/2021