Soutenance de thèse

Le Lundi, 5. octobre 2020 -
14:00 - 19:00
Salle des Actes à l’Université Paul-Valéry Montpellier 3 - Site Saint Charles

Monsieur Pierre-Laurent SAVOURET

Soutiendra lundi 5 octobre 2020 à 14 h

Salle des Actes, n° 011, à l’Université Paul-Valéry Montpellier 3, Site Saint-Charles 1

une thèse de DOCTORAT, préparée en cotutelle avec l’université de Castilla-la-Mancha (Espagne)

Discipline : Études romanes spécialité Études hispaniques et hispano-américaines

Titre de la thèse : « Quise ser buen político de Estado » La représentation du pouvoir politique dans le théâtre d'Antonio Enríquez Gómez

Composition du jury :

  • M. Raphaël CARRASCO, Professeur émérite, Université Paul-Valéry Montpellier 3, directeur de thèse
  • Mme Anne CAYUELA, Professeure, Université Grenoble Alpes
  • M. Rafael-Luis GONZALEZ CANAL, Professeur, Université de Castilla-la-Mancha (Espagne), codirecteur de thèse
  • Mme Brigitte PEREZ, Professeure, Université Paris-Sorbonne
  • M. German VEGA GARCIA-LUENGOS, Professeur, Université de Valladolid (Espagne)
  • Mme Ana VIAN HERRERO, Professeure, Université Complutense de Madrid (Espagne)

Résumé de la thèse

Antonio Enríquez Gómez (1600-1663) a attiré l’attention des chercheurs plus en raison de son parcours de vie que par la qualité de ses œuvres littéraires pourtant appréciées de son vivant. Le pseudonyme derrière lequel il cacha son identité et la question de sa foi ont longtemps concentré leurs efforts. Les découvertes d’Israel Révah dans les années 60 permettent désormais de savoir avec certitude que le même auteur écrivit sous deux noms et que non seulement il vécut comme judéo-convers mais qu’il demeura aussi certainement fidèle au credo juif. Poète autodidacte issu d’une bourgeoisie commerçante persécutée pour judaïsme, il fuit pour la France probablement afin d’échapper à la menace inquisitoriale, produisit des écrits qui laissent peu de doutes sur sa foi militante et son positionnement critique vis-à-vis de la Monarchie catholique et retourna vivre clandestinement à Séville. Les modalités de son judaïsme ne sont pas démontrées mais elles semblèrent suffisamment évidentes à l’Inquisition pour l’arrêter et le garder emprisonné jusqu’à sa mort. Malgré les questions en suspens, les conclusions de Révah en firent le représentant le plus éminent d’une littérature marrane espagnole. Dès lors il intéressa essentiellement en vertu de ce statut et donna lieu à de nombreuses controverses qui finirent par occulter l’intérêt artistique de l’œuvre.
    Or, si l’expression d’une dissidence peut trouver sa place dans des textes engagés, le théâtre, divertissement de masse tenu à une efficacité commerciale et particulièrement surveillé par le pouvoir, offre peu l’occasion d’afficher une opinion politique divergente. Nous sommes ainsi confrontés au paradoxe d’un homme à la fois marqué par son opposition et auteur d’une œuvre dramatique intégrée dans le cadre idéologique promu par le pouvoir. La seule manière de le résoudre est de recourir à la « dissimulation marranique », nécessité vitale d’occulter son identité juive dans un milieu hostile en donnant l’apparence de la concorde idéologique, sociale et religieuse avec le destinataire de ses écrits.
        Alors que les penseurs tentent d’apporter des remèdes à la crise que traverse l’Espagne, le débat politique trouve dans le théâtre un écho particulièrement retentissant. Les questions de l’origine divine du pouvoir, de la légitimité dynastique, de l’exercice vertueux du gouvernement, des grâces royales, de la justice ou de la guerre, de la place du conseil dans la prise de décision, du choix et de la fonction du favori, du droit du peuple à choisir son roi et à le renverser, celle même du tyrannicide, se posent alors avec une acuité nouvelle. Enríquez Gómez, avec son regard de biais sur la société espagnole, a pu développer une vision personnelle sur ces sujets qui, reprenant les idées exprimées dans ses traités, s’insèrent néanmoins dans les canons des comedias. S’impose donc comme nécessaire la tâche de décanter cette impureté thématique originelle pour identifier le contenu politique du discours théâtral.
        Nous organisons dans ce but notre réflexion autour des figures du pouvoir présentes dans les 27 pièces de notre corpus. Le personnage du roi a la double fonction d’assumer le pouvoir dramatique et le pouvoir souverain, ce qui le place au cœur des intrigues et de la réflexion politique qui constituent chaque comedia. Le prince, son successeur, décline ces problématiques en incarnant une autorité en devenir conflictuelle. En regard, le vassal est enjoint de se plier totalement à l’autorité royale et n’a le choix que de s’y résoudre ou de se rebeller. Mais le personnage du conseiller a une position particulière puisqu’il assume en partie l’exercice du pouvoir. La façon dont Enríquez Gómez conçoit ces personnages, ajuste leur puissance dramatique à leur puissance politique et les fait agir et réagir dans les jeux de pouvoir permet de déterminer sa position dans le débat politique de son temps et comment il fait de cette réflexion un spectacle vivant.

Dernière mise à jour : 24/09/2020